En période de crise, plus que jamais, la concurrence fait rage. Les marques, quelles qu’elles soient, cherchent à tout crin une rentabilité économique. Et les marques médias ne sont pas en reste.
On le déplore tous, les medias souffrent. Chaque semaine ou presque, des titres meurent. Entre attachés de presse, se remémorer les titres disparus est un jeu… au goût amer. Ainsi, les medias eux aussi doivent se battre, eux aussi ils doivent rechercher la moindre source de revenu. Il n’est donc pas si étonnant que les medias investissent dans leur marque. Mais dans cette course à la notoriété, les marques médias n’écrasent-elles pas les marques annonceur ?
Marque de presse généraliste et marque de presse spécialisée, même combat ?
Si la puissance des marques de certains medias généralistes est époustouflante, comme Le Monde ou TF1, celle de titres plus spécialisés croît fortement. Qui ne connaît pas aujourd’hui Le JDN, par exemple ? Mais si la puissance de diffusion a été certainement un des critères déterminants pour la notoriété des marques medias généralistes, qu’en est-il des medias spécialisés ?
Comment ceux-ci font-ils pour augmenter leur notoriété ? Peu peuvent bénéficier d’une part de marché très importante et donc simplement exister pour développer leur image. Peu peuvent aussi capitaliser sur la notoriété de certains de leurs journalistes qui vont intervenir dans des médias concurrents, portant toujours avec eux l’identité de la marque du média qui les a « fait ». Une de leur stratégie est de se différencier et notamment de surfer sur les exclusivités. Le premier titre qui aura dévoilé l’iPhone 7, par exemple, fera un bon coup, qui l’aidera non seulement à attirer de nouveaux lecteurs curieux, mais aussi à se positionner comme un titre majeur et gagner en notoriété. Oui certes, la presse généraliste est aussi avide d’exclusivité. Une interview de Fidel Castro (sic) ou plus sérieusement de Julie Gayet (re-sic) renforcera encore l’image d’un grand média. Ce n’est donc pas uniquement en publiant des exclusivités et en le faisant savoir, que la presse généraliste renforce son image. Pourtant, la presse spécialisée, elle, le pense. Les titres de presse spécialisée se livrent une concurrence effrénée. Rien que sur l’actu, tous se battent pour être le premier à dévoiler telle ou telle nouveauté. Et par peur de ne pas être les premiers, certains adressent leur newsletter quotidienne bien avant l’heure du laitier, pour être au moins le premier à publier ! Et même en dehors de l’actu, pensant toujours devoir être non seulement les premiers mais les seuls, la tendance est à exiger des exclus. Oui cette interview m’intéresse mais seulement si je suis le seul à l’obtenir. Oui, je prends ce sujet, mais j’exige que personne d’autre ne le prenne.
Difficile à accepter, mais finalement tout ça pourquoi ? Cette exclu obtenue et publiée, comment va-t-elle être exploitée ? Et bien elle sera tweetée, facebookée, Googleplusée etc. Et l’info, apportée par la marque annonceur, offerte exclusivement au media, va surtout servir à construire et renforcer la marque media. Il ne s’agit finalement plus de diffuser une info, plus même d’informer, mais simplement d’aider la marque media à renforcer son image. Comme si la marque media devait être nécessairement plus forte que la marque annonceur !
Alors quid de l’information, quid du lecteur, quid de la plume signataire et quid de la marque qui fait l’effort de communiquer ? Oui, on me traitera de ringard des RP si je pense encore qu’un média doit informer. On me pensera idéaliste, si je crois en tant que citoyen, qu’un media a une mission d’éducation. On me pensera dépassé si en tant que communiquant je pense qu’un annonceur doit continuer à investir dans les RP, en trouvant le bon moment, le bon angle, en toute vérité.
Mais qui me trouvera idiot de penser que les marques media n’existent en grande majorité que grâce aux marques annonceur et que les marques de presse spécialisée ont d’autres stratégies bien plus efficaces que celles qui utiliseraient l’annonceur dans l’unique objectif de s’installer et dominer un marché. En attendant, je vais commander un VTC chez Uber pour aller boire un Coca-Cola, sucer un Mentos (pas en même temps, je sais), à la terrasse du café Beaubourg, y manger un macaron Pierre Hermé, et je mettrai mon iPhone ne mode silencieux, pour lire le dernier numéro du Canard Enchaîné ! Nanère !